Novembre 2013

Fiche repère : les Roms, nouvelle frontière


Introduction

  • Le Conseil de l'Europe estime que douze millions de personnes appartiennent aux différentes communautés « Roms » , qui constituent de ce fait la plus importante minorité ethnique du continent. Seuls deux millions de Roms ne sont pas sédentarisés et forment donc des groupes migrants. Ces populations sont présentes en Europe depuis la fin du XVe siècle et victimes de discriminations depuis lors. Les migrations les plus anciennes ont formé les gens du voyage et depuis les années 1990, ils sont communément regroupés sous le terme « rom ».
  • Deux événements majeurs expliquent les récentes migrations de Roms au sein de différents pays européens : la chute du mur de Berlin et l'intégration de la Roumanie et de la Bulgarie au sein de l'Union européenne. Les frontières autrefois gardées sont devenues poreuses, voire inexistantes par le jeu de la construction européenne, qui a pour objectif de rassembler les peuples.
Pourquoi
  • En France, environ vingt mille personnes majoritairement originaires de Roumanie et, dans une moindre mesure, de Bulgarie, constituent la partie migrante de la population rom, qui réside dans des bidonvilles insalubres : plus de quatre cents campements localisés pour la plupart en Ile-de-France (douze mille personnes) ont été répertoriés.
  • En proie à la misère, cette population est de surcroît victime de nombreuses discriminations et stigmatisations relayées par des personnalités publiques (ainsi d'un élu local appelant à « mater les Roms ») et des médias (par exemple, l'hebdomadaire Valeurs actuelles a intitulé sa « Une » du 22 août 2013 « Roms, l'overdose »).
  • Ce sujet alimente de nombreuses confusions trouvant leur source dans la problématique de la frontière. Aux frontières extérieures, qui n'existent plus, se sont substituées des frontières intérieures, incarnées contre leur gré par certaines populations, notamment les Roms. Une « invasion » est crainte, alors même que les chiffres des migrations sont stables depuis trois ans. La levée des restrictions d'accès à l'emploi au 1er janvier 2014 alimente quant à elle les fantasmes.
  • On a pu notamment constater au sein même des administrations publiques certaines difficultés à distinguer Roms et gens du voyage, lesquels n'ont pas immigré en France. Plus largement, les Roms sont souvent considérés comme des étrangers en situation irrégulière, alors même qu'ils jouissent de la citoyenneté européenne et ont, à ce titre, le droit de circuler librement en France.

  • Ainsi, le « problème rom » reflète la crainte de l'autre, alors même que celui-ci, en plus d'être un semblable, est un concitoyen. Résoudre les inégalités de traitement, rapprocher les différentes populations et combattre les discriminations dont les Roms font l'objet est une condition nécessaire de la création d'une Europe unie.

  • Plusieurs raisons d'agir en faveur d'une intégration réelle des Roms découlent logiquement de ces constats :
1. Les Roms subissent des discriminations et stigmatisations séculaires (certains étaient notamment réduits en esclavage jusqu'au XIXe siècle). Cette situation ne peut perdurer.

2. Les populations résidant dans des bidonvilles souffrent de conditions de vie insupportables qui font obstacle à leur intégration. Une politique de démantèlement systématique ne peut constituer une solution de long terme : les populations évacuées se déplacent de camp en camp sans que leur situation soit changée.


3. Dans le même temps, l'existence même de bidonvilles est intolérable pour leurs occupants et les habitants des environs. Cette situation exacerbe les crispations et incompréhensions, et nourrit les comportements de rejet.

Engagements individuels


1. Se renseigner afin d'obtenir des informations objectives sur la situation des Roms : leur nombre, leurs conditions de vie, leur statut juridique. Notamment, ne plus confondre les populations roms avec les gens du voyage, ni les Roms dans leur ensemble avec les habitants des bidonvilles. Il s'agit de ne pas céder à la facilité des polémiques superficielles lancées çà et là pour attirer l'attention.

2. Accepter la complexité du problème, qui ne trouvera jamais de réponses simples. Les situations sont multiples et appellent des solutions novatrices et adaptées. Chacun doit y mettre du sien : il n'y a pas de coupables, mais une situation qui ne peut plus durer.

Engagement des organisations

  • Assurer une médiation entre les différents acteurs concernés afin de trouver des points d'entente par la conciliation. Informer chaque partie des contraintes pesant sur les autres afin de favoriser un climat d'entente et de dialogue.

Engagements de l'État

1. Appliquer la circulaire en date du 26 août 2012 relative à l'anticipation et à l'accompagnement des opérations d'évacuation des campements illicites, laquelle prévoit un diagnostic de la situation avant toute décision d'évacuation et la mise en place d'un accompagnement adapté ex post.

2. Établir une série de diagnostics territoriaux pour chaque famille ou individu isolé afin d'avoir une connaissance fine des populations vivant dans des bidonvilles.


3. Permettre aux populations vivant dans des bidonvilles de jouir de leurs droits, notamment en informant les agents de l'État de leur statut. Les Roms ont majoritairement la citoyenneté européenne et bénéficient à ce titre de droits qui doivent leur être reconnus. Cela implique également de scolariser systématiquement les enfants, nonobstant la durée plus ou moins courte de leur passage au sein de l'école considérée.

4. Favoriser l'accès à l'emploi, en informant les acteurs concernés qu'une autorisation de travail suffit à ce qu'un ressortissant roumain ou bulgare puisse travailler sur le territoire français. Cet exemple fait écho au point 3. : les agents de l'Etat ne doivent pas exiger d'un travailleur roumain ou bulgare un titre de séjour vis-à-vis de sa situation professionnelle.


5. Changer les regards sur les populations vivant dans les bidonvilles via des actions de sensibilisation et des opérations de communication. Il faut notamment agir à l'école afin de sensibiliser au plus tôt les générations futures.

6. Collaborer au niveau européen pour un échange de bonnes pratiques et une politique commune en vue de l'intégration des populations roms sur tout le territoire de l'Union.