Si la mode de la petite queue de rat partant de la racine des cheveux et tombant sur la nuque apparaît totalement achevée, au point que seuls quelques malheureux enfants, sans doute victimes de maltraitances parentales, en sont désormais affublés, l'homme moderne n'a pas, loin s'en faut, renoncé à faire pendre sur l'arrière de son crâne un attribut capillaire. De fait, le catogan robe de cocktail reste de nos jours une valeur tristement sûre. Au-delà de toutes considérations d'ordre esthétique, ce constat établit d'abord l'incapacité de l'homme moderne à retenir ses erreurs et à en tirer les leçons qui s'imposent. Car le catogan ne date pas d'hier. Aperçu au XIIe siècle sur Gengis Khan, l'illustre combattant mongol, puis formalisé au début du XVIIIe siècle par le comte et général de l'armée anglaise Guillaume de Cadhogan, qui lui donna son nom, le catogan a ainsi traversé les siècles sur la base d'une qualité incontestable, mais fort relative.

A l'instar du bandeau arboré par nombre de tennismen à la chevelure dense, le catogan permet en effet de rester dans l'action en dépit d'un manque criant de soin capillaire. Concrètement, si le comte de Cadhogan imposa à ses soldats de le porter, c'est pour que leurs cheveux ne les empêchent pas de voir le champ de bataille, en dépit de longs mois sans le moindre rendez-vous chez un quelconque coiffeur. De la même façon, si le catogan apparaît extrêmement populaire chez les amateurs de jeux en ligne tel "Warcraft", c'est bien parce qu'il leur permet de conserver une visibilité parfaite de l'écran, et ce même après de longues journées sans le moindre shampoing ou coup de peigne.

Prisé par les amateurs de jeux de rôle ou de rock sataniste, souvent adeptes d'un catogan sec et dru, régulièrement adopté, aussi, par les footballeurs italiens et argentins, davantage portés sur une version grasse et brillante, le catogan apparaît donc comme un choix capillaire uniquement guidé par le sens pratique, voire par une certaine fainéantise. Cela en fait un choix esthétique robe de bal par défaut. Ainsi, mécaniquement, un catogan bien serré aura toujours tendance à aplatir la tête de celui qui l'arbore, au point que tous les hommes à catogan se ressemblent un peu et apparaissent unis par une sorte de légère malformation crânienne. Coupe sans qualité, exigeant très peu de travail mais n'offrant pas la moindre satisfaction, sinon celle de ressembler à Francis Lalanne, à Karl Lagerfeld ou à Zlatan Ibrahimovic, le catogan n'a donc, au fond, aucune raison d'être. A moins que ce ne soit une invitation divine à la violence et la punition. En effet, qui pourra en vouloir à un homme tirant sèchement sur le premier catogan venu ? D'une façon ou d'une autre, sa victime l'aura bien mérité.